Intelligence artificielle et droit d’auteur : quels défis ?

Dans le contexte de la création artistique, l’usage de l’intelligence artificielle soulève actuellement des questions sur plusieurs aspects.

Utilisation d’œuvres existantes pour l’entrainement des algorithmes
Les systèmes d’IA tels que ChatGPT ou Midjourney exercent leurs capacités en premier lieu avec du contenu qu’ils trouvent sur Internet. Si l’on ne demande pas l’accord des ayants droit pour cette utilisation d’œuvres protégées et qu’on ne les rémunère pas, il y a violation du droit d’auteur selon le droit suisse.

Génération de contenus – avec l’aide de ou par l’intelligence artificielle ?
Il convient de différencier les modes de production recourant à l’IA :

  • Œuvres créées par des humains qui se servent d’outils d’intelligence artificielle au cours du processus créatif ;
  • Contenus générés entièrement par un système d’intelligence artificielle et sans intervention humaine.

Dans le premier cas, les autrices et auteurs interviennent dans le processus de production et donnent ainsi au résultat un caractère individuel – critère essentiel pour accéder au statut d’une œuvre protégée. Il s’agit donc d’œuvres créées par des humains à l’aide de systèmes, d’outils ou de techniques d’IA. Dans le secteur audiovisuel, il existe déjà de nombreuses applications basées sur l’IA qui servent à assister la création de contenu.

En revanche, de l’avis prééminent sur l’interprétation des règles internationales et nationales actuelles en matière de droit d’auteur, la protection par le droit d’auteur serait exclue pour des productions générées par l’IA sans intervention humaine.

Par ailleurs, toute tentative visant à accorder une protection du droit d’auteur à la production sans intervention humaine priverait les créatrices et les créateurs de l’incitation à créer, et accorderait une protection indue aux entreprises développant ou aux utilisatrices et utilisateurs utilisant de l’IA.

Enfin, les droits d’auteur et les droits voisins sont bien sûr aussi touchés lorsque les produits des systèmes d’IA générative sont similaires à leurs sources et laissent reconnaître une œuvre ou une interprétation préexistante. Dans ce cas, il faut considérer qu’il y a non seulement utilisation d’une œuvre ou interprétation existante, mais aussi adaptation de celles-ci, ce qui nécessiterait évidemment l’autorisation de leurs ayants droit.

Principes d’une régulation de l’IA centrée sur l’humain et qui favorise la créativité
La production générée par l’IA à faible coût entraîne une concurrence déloyale envers les œuvres créées par des humains. La valeur de la créativité humaine s’en trouve réduite. Il incombe donc aux instances législatives d’éviter ces situations de concurrence déloyale et de réglementer l’IA. 

Pour que l’IA soit au service de la société et renforce la créativité humaine, les principes fondamentaux d’autorisation et de licence, de rémunération et de transparence concernant l’utilisation d’œuvres protégées dans les processus doivent s’appliquer. Les sociétés de gestion de droits sont bien placées pour représenter collectivement les autrices et les auteurs et négocier avec les entreprises de développement d’IA.

Au niveau européen, des efforts ont déjà été faits pour réglementer l’utilisation de l’IA : au mois de juin, le Parlement européen s’est mis d’accord sur un premier projet de loi. En Suisse, en revanche, la discussion au niveau politique ne fait que commencer.

Swisscopyright, qui regroupe les sociétés d’auteurs et de droits voisins suisses, a préparé des premières réponses aux questions relatives au droit d’auteur dans le contexte suisse.

Les sociétés qui protègent les créations et interprétations artistiques du monde entier s’opposeront fermement à un pillage non autorisé des œuvres, de concert avec les associations qui défendent les intérêts des artistes professionnel/le/s.

Sources :
SAA position paper: AI must serve society and enhance human creativity | SAA (saa-authors.eu)

swisscopyright.ch/fr/news/news-fr/news/lettre-de-session-de-septembre-2023.html

Pour en savoir plus :